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Portrait

Pierre Paul Riquet et le Canal du midi

Pierre Paul Riquet et le Canal du Midi, patrimoine mondial de l’UNESCO

Débuté en 1667, le « Canal du Midi » – l’une des innovations technologiques du XVIIème siècle, est inauguré en mai 1681. Cette construction, que Vauban décrit comme « une merveille de l’Europe », est inscrite depuis 1996 sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO.

 

Un entrepreneur et un ingénieur exemplaire

C’est à Pierre Paul Riquet que l’on attribue la conception du Canal du Midi. En 1667, cela fait plusieurs siècles que de nombreuses générations d’ingénieurs réfléchissent à créer une voie navigable pour relier la Méditerranée à l’océan Atlantique sans passer par le détroit de Gibraltar. Déjà, au VIIIème siècle sous Charlemagne, des études étaient faites dans ce sens mais la question de l’approvisionnement en eau d’un tel canal était toujours restée sans réponse.

Neuf siècles plus tard, grâce à l’esprit innovant de Pierre Paul Riquet, ce projet peut enfin voir le jour : il prouve sa faisabilité en proposant d’alimenter le canal avec l’eau de la chaîne de montagnes de la Montagne Noire, puis planifie sa construction à proprement parler.

 

Le percepteur de la taxe du sel

Né en 1609 à Béziers, dans le sud du Languedoc, Riquet vient d’une famille importante de commerçants. Il étudie au collège des Jésuites de Béziers et à 19 ans épouse Catherine de Milhau, elle-même issue d’une riche famille locale. En 1630, il devient gabelou : il est chargé de collecter la gabelle – l’impôt royal sur le sel – dans la région du Haut-Languedoc. En effet, au XVIIème siècle, le sel est un produit de première nécessité, indispensable pour la conservation des aliments. Ainsi, la couronne en a le monopole et il fait l’objet d’une taxe. Ce métier, cumulé avec son activité de fournisseur d’armes pour l’armée royale dans la guerre contre l’Espagne, permet à Pierre Paul Riquet de s’enrichir.

En 1652, il acquiert la seigneurie de Bonrepos (un château plutôt modeste pour une famille si riche !) située à proximité de Toulouse, dans l’actuel département de la Haute-Garonne. Riquet choisit de s’établir à Bonrepos pour le potentiel hydrographique de la propriété. Il construit, dans la zone boisée en bordure de son terrain, une machine qui reproduit l’écoulement des eaux de source de montagne et leur acheminement vers un point de partage entre les eaux qui vont vers la Méditerranée et celles qui vont vers l’Atlantique. Ce dispositif lui permet de tester ses idées et de démontrer que le projet du futur Canal du Midi est bel et bien réalisable.

 

La lettre à Colbert

Le 15 novembre 1662, Riquet adresse une lettre à Colbert, alors intendant des finances pour le roi Louis XIV, lui exposant son projet de construction du canal. Il propose d’investir son propre argent pour financer les travaux, en échange de quoi il demande que sa famille soit reconnue propriétaire du canal, et puisse en jouir gratuitement pour transporter des marchandises et des passagers en exclusivité. Ces conditions sont acceptées par édit royal en Octobre 1666.

Les travaux du Canal du Midi commencent en 1667. Afin d’accélérer le chantier, plusieurs sites de construction sont ouverts en simultané. Un site est constitué de 250 ouvriers, répartis en 5 équipes dirigées par un gestionnaire de site. Au plus fort de l’activité, tous sites de construction confondus, ce sont environ 12 000 personnes qui participent à ce projet gigantesque. Riquet se révèle être un bon employeur : en plus de salaires justes et plutôt bons, il rémunère ses travailleurs les dimanches, les jours de fêtes religieuses, les jours de mauvais temps et même les jours de maladie. Pour cela, on le considère comme un pionnier du système de sécurité sociale.

La construction du Canal du Midi est ardue. En effet, un risque élevé de glissement de terrain force Colbert, devenu Premier ministre, à ordonner l’arrêt temporaire des travaux du tunnel de Malpas. En réponse à cet ordre royal, Riquet demande à son maître maçon, Pascal de Nissan, de continuer le tunnel en secret, malgré le risque d’effondrement. Une décision audacieuse que seul un ingénieur très compétent aurait pu prendre, mais qui permet au tunnel d’être terminé en huit jours.

 

Riquet ne voit pas son rêve devenir réalité.

Riquet meurt le 1er octobre 1680, épuisé et criblé de dettes, après avoir misé son énergie et toute sa fortune dans l’œuvre pharaonique qu’est le Canal du Midi. A ce moment-là, il ne manque que 5 kilomètres pour que la construction du canal soit achevée ! Ses fils Jean Mathias et Pierre Paul continuent alors le travail de leur père, et l’inaugurent le 19 mai 1681.

Le Canal du Midi – 240 km de long entre Toulouse et Sète, avec une profondeur moyenne de 2 mètres, une largeur comprise entre 16 et 19 mètres, et un volume de 7 millions de mètres cubes d’eau – est le plus grand chantier de son époque. Il rejoint la Garonne à Toulouse, reliant ainsi la Méditerranée à l’océan Atlantique, et mérite donc aussi son surnom de Canal des Deux Mers. L’eau qui le remplit provient des différentes sources de la chaîne de la Montagne Noire, acheminée par l’intermédiaire d’un système de drainage sophistiqué pour réguler la quantité d’eau selon les conditions météorologiques et les besoins.

 

Un projet plus que complexe.

Le Canal des Deux Mers est constitué de deux segments. Le premier segment correspond au cours d’eau artificiel, ou canal du Midi, conçu et construit par Riquet, entre le port méditerranéen de Sète et la ville de Toulouse. Pour le bon approvisionnement du canal en eau, un barrage est nécessaire : avec ses 780m de longueur et ses 120m de largeur, le barrage de Saint-Ferréol voit le jour en 1672 après 5 ans de construction. Ce complexe hydrotechnique qui, au moment de sa construction, a une capacité de 4.5 millions de mètres cube, contrôle la quantité d’eau acheminée vers le point de partage de Naurouze.

Le second segment du Canal des Deux Mers correspond à la Garonne, fleuve naturel qui relie Toulouse au port de Bordeaux. En raison des différences de débit selon les saisons, la Garonne est un fleuve difficile à naviguer. A la fin du XVIIème siècle, Vauban propose donc de creuser un nouveau canal, parallèle à la Garonne. La construction de ce « Canal Latéral à la Garonne » n’est finalement entreprise qu’au XIXème siècle, durant le règne de Louis Philippe. Long de 193 kilomètres et comportant 53 écluses, ce nouveau cours d’eau artificiel inauguré en 1856 relie Toulouse à Castets-en-Dorthe, au nord de Bordeaux.

Le Canal des Deux Mers est à l’apogée de son activité et de sa popularité entre le XVIIIème siècle et le milieu du XIXème siècle. Thomas Jefferson, alors ambassadeur américain à la cour de Louis XVI, visite le canal en mai 1787. A cette époque, il transporte presque 100.000 passagers par an. Peu à peu, avec les années, mais surtout le développement du réseau ferroviaire en France et en Europe, le transport fluvial de marchandises et de personnes perd de la vitesse et de la fiabilité. De nos jours, le Canal du Midi, avec ses eaux paisibles et des rives bordées de platanes, est une attraction touristique prisée. Depuis les années 1980, la navigation est ouverte de mars à novembre, pour les bateaux de plaisance uniquement.

 

Monument préféré des français.

En 2020, le Canal du Midi figure parmi les 14 sites sélectionnés pour devenir le monument préféré des Français. Suite au vote des Français, il arrive finalement en 8ème place.

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